Derrière la tête, une énorme cicatrice lui descend dans le cou pour barrer sa moelle épinière au milieu du dos. Deux lourdes tresses de cheveux châtaigne lui retombent sur les reins à chacun des grands gestes qu’elle fait pour découper des morts.
Je la vois sur les murs de ma chambre, au ralenti, pour magnifier sa contenance irascible. Par flashs, elle explose de rage et découpe un bras, une tête. Ils retombent comme des confettis et roulent jusqu’au pilonne sur lequel je me tiens accroupis, rebondissant avec enthousiasme. Un amas de merveilles s’étend à mes pieds. Et mon amazone souris, innocente, barbouillée de sang.
Derrière l’écran noir se tient une fillette tremblante, trempée jusqu’à l’os. Elle attend au milieu d’un hangar au toit transpercé, à l’air glacé, les yeux voraces écarquillés, dévorant les vides. Ils hurlent quelque chose de beau et d’ignoble qui résonne à l’intérieur sa tête. Elle passera sa vie à tenter retrouver ces cris enchanteurs aux confins de l’horreur.
Je dessine la carte qui sera ton hôte. Derrière la glace plastifiée j’applique les couleurs aux décors où tu pourras t’échapper. Je crée quelques lois d’univers, des monstres aux sens incompris qu’il te faudra apprendre à aimer, des nuits éternelles dont tu seras l’intime, et pour conjurer la tristesse je pourrai sentir, quand tu pousseras ta main sur cette glace, quelque chose comme ta chaleur.
Au bonheur de tenir, j’ai préféré nous laisser vivre. Que se déchaîne dans chacun de nos univers les fatalités exquises que notre colère voudra bien lui imprimer.