Kuedo – Severant
L’réveil métallique projette un faisceau de néon violet à la face de l’inspecteur. Assommé par l’Absinthe, il peine à émerger du cauchemar dans lequel vibrait son esprit. Trimbale alors sa carcasse en slip jusqu’au bar encombré de détritus – robot nettoyeur congédié il y a peu , suite à un accès de colère. D’un geste lent il attire vers lui la bouteille éventrée, et boit directement au goulot. Allers-retours électriques de la glotte , circuits neuronales cramés au son, l’inspecteur s’effondre sur son tapis, acheté dans un souvenir, aux côtés d’une grande femme aux cheveux bleus.
La nuit a depuis longtemps avalé la chaleur artificielle du jour, et son haleine acide s’immisce au plus profond des rues et des artères. La ville est en émoi : des grappes de jeunes s’agglutinent devant les bars et autres clubs, pressés par le manque. Leurs mâchoires claquent d’impatience, les discutions sont agitées. Raoul renifle des restes de crystal sur l’arrête de son pouce et s’engouffre à l’intérieur d’une salle d’où s’échappent des beats pachydermiques. Dans les toilettes, où s’étale aux murs la crasse de toute une génération perdue, Raoul achète en scred deux grammes d’une poudre violette, légèrement pailletée. Il saupoudre le tout sur sa langue , et, évitant les miroirs, sort furtivement des chiottes. Les néons crépitent de fureur, déversant leur lumière sur une masse en sueur , Raoul sent un corps de fille se coller au sien, remue un peu les hanches, puis c’est le break, des beats hélicoptères (Scissors) l’emportent loin, écrasant ce qu’il lui restait de conscience, hachant ses membres avec délice.
Kuedo nous offre un album aux allures de guide nocturne imparable, idéal pour se paumer en toute inconscience dans les méandres d’un monde extatique et futuriste, peuplé de cyborgs à la silhouette gracieuse et dont les rues seraient pavées de corps désarticulés, ravagés par le Temps, la Musique et la Solitude.