Ses robes de feu ont ce qu’il faut de douleur pour m’envoyer croquer la nuit avec entrain; en quelques titres et une pochette touchante, elle a transformé ma vie en un lac frais et brumeux, une étendue d’eau empoisonnée dans laquelle je plonge avec délice. J’ai plus d’appréhension parce que je ne suis plus vraiment là, et n’ai plus de raison d’être [—]
Mi-kitch mi-émo, elle dégoupille ses couplets grenades avec un flegme frénétique bouillant, sa perception du monde est immédiate, son Spleen exhale toutes les odeurs — et à ses pieds je veux bien choir, la gueule en vrac, cajolée par un esprit affuté dont les contours illuminent ce qu’il nous reste à tous… Sans m’en rendre compte, je suis tombée amoureuse de la voix d’une Ombre qui fait cavalier seul; elle ne cache ni ne cherche à cacher sa raison d’être, consciente que le combat est perdu d’avance… Pourtant, la voilà qui tranche le marécage dans lequel végètent ses congénères, passant régulièrement ses mains de nacre sur la crosse du revolver logé à sa ceinture. À mesure qu’on avance dans l’album, sa cohérence prend à la gorge. Sa voix nous chuchote qu’on ne tiendra pas le voyage mais les instrus nous clament le contraire : par à-coups crépitants, les poings brandis contre la peau tendue de la Nuit, l’ultime flirt avant la fin du monde prend forme et crache sa douleur à la face blanche de la Lune. Mes enceintes ont les courbes moites d’une âme en transe, y’a plus rien à régurgiter, ni rien à espérer, simplement quelques mélodies implacables à cueillir, une longue nuit à embrasser de tout son être et l’Amour à snober, les lèvres ouvertes aux bouches vermeilles.
Lolita, réincarnation délurée d’une Ophélie magnétique, a l’instinct rieur des songes dans lesquels on a pour habitude de se réfugier – pourtant, elle se sent mieux sans toi, d’une justesse éclatante lorsque tu n’es plus, et, prenant son courage à deux mains, elle te le fait savoir. Banni du royaume des Illusions, tu traines ta carcasse fantôme dans les entrailles d’une ville que tu croyais connaître. Tu soutiens du bout des lèvres que tout ira mieux demain, les sirènes de police dissèquent tes espérances — par amour ?
Tout finira par mourir à petit feu.