Une bastos dans le bide du jeune fou s’éclate à broyer ses entrailles, la douleur est électrique, léchant ses iris à gros coup de pelle. La silhouette, recouverte d’un ample t-shirt, capture, et ce, à chaque plan, l’haleine décomposée du vide ; le cracha fétide du temps s’accroche à ses manches, l’homme n’est plus qu’une ombre sans contour, valdinguant d’un bout à l’autre du continent, sous le souffle rancunier du dieu Chaos. Les squelettes bouillonnent, le long de ton dos la sueur dégouline, l’air a des relents d’enfer, les doigts se crispent sur les crosses, appuient sur la détente: les guns hurlent à la mort, l’intelligence du réalisateur à capter leur allure, ce sont bien les petits détails qui dominent, pas de place pour Dame raison : des clefs, une boite de conserve, une poignée de balles, telles sont les denrées dont IL a besoin pour avancer. Survivre un peu encore, sur ce sol ravagé, avec toujours cette impression de n’être plus sur Terre : le terrain de jeu est immense, infinies sont les possibilités et la folie s’en donne à cœur joie. La voilà qui trottine, pissant allègrement sur les cadavres que l’épopée engendre, léchant doucement ses babines trouées à l’affût du moindre faux pas : libérés de toute morale les individus se blessent, à 2-3 exceptions près : et c’est là qu’enfin le film dévoile l’étendue de sa puissance : en un regard ou quelques gestes, parfois l’esquisse d’un mot, une fragile alchimie de l’âme se crée , déployant ses ailes poussière par delà l’horizon, invitant les deux nouveaux frères à tendre leurs échines vers un destin moins funeste… Fascinant de la première à la dernière seconde, The Rover se renifle, s’avale comme un coup de poing dans le claquoir. A l’instar de Pierce à bord du 4X4 bosselé, l’on doit quitter notre condition humaine et nous muer en prédateur grondant, la gueule suintant de rage, l’oeil frémissant, rongeant les os de nos victimes jusqu’à en vomir devant l’Eternel.
The Rover
Mon royaume pour un clébard.