Fury
David Ayer – 2014
Robuste et fier, l’animal aux lourdes chenilles cuivrées, tapi dans
l’ombre rassurante d’un cimetière monochrome, observe à travers l’oeil
de son canon 75 mm la proie.. Vêtu d’un uniforme souillé, Hadès, juché
sur sa monture immaculée, trotte imprudemment entre les carcasses
carbonisées des multiples chars tombés au combat, écrabouillés par la
Fureur du conflit et régurgités pêle-mêle sur le sol bourbeux de cette
Plaine des asphodèles hantée par une poignée de chimères dont les
gueules fatiguées n’entravent aucunement leur envie d’en découdre ; le
regard souligné de crasse, les cheveux plaqués à l’arrière de son crâne
épuisé, Wardaddy jaillit sur son bourreau, découpe silencieusement sa
chair et , scrutant le fond de l’âme du blanc cheval, dicte son message
aux Puissants: pas encore. Revenu d’entre les morts , Fury, et, à son
bord, les 4 trompe-la-mort hirsutes, s’octroie quelques instants de
pause, ce qu’il faut de temps pour se réapprovisionner en munitions et
embarquer un gamin au regard éthéré, symbole (un poil trop étudié) d’une
jeunesse intacte porteuse d’espoir.. La bordélique équipée s’engage
alors sur une route pavée de corps fangeux, roulant allègrement sur ces
squelettes broyés à l’extrême , avalés par un sol hostile pétri de
pièges… David Ayer alterne les points de vue (celui du char, de
Wardaddy et d’la recrue) avec aisance et nous propulse dans l’âpreté de
combats virulents, mâtinés de fougue, modulant l’espace-temps au gré de
la folie de ses personnages : impossible d’occulter la dureté des
images, l’agressivité des corps hurlant à la frontière du Trépas. Les
chairs sont malaxées par les griffes de la Guerre, les âmes saignent,
les viandes boursouflées de cadavres ambulants hantent la plupart des
plans, et ce sont bien des larmes d’eau bénite qui ruissèlent sur les
joues du Christ assassiné par balles 7 mm, dépassé par l’horreur d’une
réalité à laquelle il n’appartient plus depuis son sacrifice . Des
cendres du monde annihilé s’élève en volutes discrètes une vulnérable
mélodie composée sur les restes d’un piano centenaire. Les touches
égratignées de l’instrument témoignent de la présence de cette armée de
spectres aux vies tronquées, qui à jamais se battent, à leur manière,
contre l’indifférence.
l’ombre rassurante d’un cimetière monochrome, observe à travers l’oeil
de son canon 75 mm la proie.. Vêtu d’un uniforme souillé, Hadès, juché
sur sa monture immaculée, trotte imprudemment entre les carcasses
carbonisées des multiples chars tombés au combat, écrabouillés par la
Fureur du conflit et régurgités pêle-mêle sur le sol bourbeux de cette
Plaine des asphodèles hantée par une poignée de chimères dont les
gueules fatiguées n’entravent aucunement leur envie d’en découdre ; le
regard souligné de crasse, les cheveux plaqués à l’arrière de son crâne
épuisé, Wardaddy jaillit sur son bourreau, découpe silencieusement sa
chair et , scrutant le fond de l’âme du blanc cheval, dicte son message
aux Puissants: pas encore. Revenu d’entre les morts , Fury, et, à son
bord, les 4 trompe-la-mort hirsutes, s’octroie quelques instants de
pause, ce qu’il faut de temps pour se réapprovisionner en munitions et
embarquer un gamin au regard éthéré, symbole (un poil trop étudié) d’une
jeunesse intacte porteuse d’espoir.. La bordélique équipée s’engage
alors sur une route pavée de corps fangeux, roulant allègrement sur ces
squelettes broyés à l’extrême , avalés par un sol hostile pétri de
pièges… David Ayer alterne les points de vue (celui du char, de
Wardaddy et d’la recrue) avec aisance et nous propulse dans l’âpreté de
combats virulents, mâtinés de fougue, modulant l’espace-temps au gré de
la folie de ses personnages : impossible d’occulter la dureté des
images, l’agressivité des corps hurlant à la frontière du Trépas. Les
chairs sont malaxées par les griffes de la Guerre, les âmes saignent,
les viandes boursouflées de cadavres ambulants hantent la plupart des
plans, et ce sont bien des larmes d’eau bénite qui ruissèlent sur les
joues du Christ assassiné par balles 7 mm, dépassé par l’horreur d’une
réalité à laquelle il n’appartient plus depuis son sacrifice . Des
cendres du monde annihilé s’élève en volutes discrètes une vulnérable
mélodie composée sur les restes d’un piano centenaire. Les touches
égratignées de l’instrument témoignent de la présence de cette armée de
spectres aux vies tronquées, qui à jamais se battent, à leur manière,
contre l’indifférence.